Vingt-neuf acteurs majeurs du secteur de la rénovation énergétique, allant des énergéticiens aux bailleurs sociaux, en passant par les professionnels du bâtiment, se sont mobilisés pour interpeller le gouvernement français à travers une lettre ouverte adressée au Premier ministre. Leur demande principale : prolonger et pérenniser les règles en vigueur du dispositif MaPrimeRénov’, une aide financière essentielle pour encourager la rénovation énergétique des bâtiments. Ce dispositif, qui connaît quelques ajustements en 2024, est au cœur des préoccupations de ces acteurs, tant pour son impact environnemental que pour les économies qu’il permet aux ménages.
Un appel fort au maintien des règles actuelles
Les signataires, consultés par l’AFP, estiment qu’il est crucial de maintenir les ajustements actuels du dispositif MaPrimeRénov’. En l’absence d’une stratégie plus globale pour relancer le secteur, ils demandent que les mesures déjà en place soient prolongées, au moins jusqu’à ce qu’un cadre plus durable et simplifié soit mis en œuvre pour les rénovations, tant pour les particuliers que pour les professionnels.
Parmi les signataires, on retrouve des acteurs de différents horizons :
-Des énergéticiens : EDF et Engie, deux géants du secteur de l’énergie, figurent parmi les premiers signataires de cette lettre. Ces entreprises ont un rôle clé dans la transition énergétique du pays, notamment à travers la promotion de solutions énergétiques durables.
-Des représentants du bâtiment : La Fédération Française du Bâtiment (FFB), qui représente les entreprises du secteur, soutient également cet appel, reflétant l’importance de MaPrimeRénov’ pour maintenir l’activité des artisans et entreprises dans un contexte où les chantiers de rénovation sont en baisse.
Des fabricants et distributeurs de matériaux et d’équipements liés à la rénovation énergétique, qui voient dans ce dispositif un levier important pour écouler leurs produits et contribuer à la transition énergétique.
Les bailleurs sociaux, syndics, gestionnaires de biens et notaires sont aussi impliqués. Ils jouent un rôle déterminant dans la rénovation des logements sociaux et la gestion du parc immobilier privé.
Des maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre qui supervisent les travaux et assurent leur bonne exécution.
Ces organisations, en plus d’associations comme l’Union Française de l’Électricité (UFE), le Syndicat des Énergies Renouvelables (SER) et la Fnaim (Fédération nationale de l’immobilier), forment un front uni pour défendre un dispositif qu’elles considèrent essentiel à la transition énergétique française.
Les ajustements de MaPrimeRénov’ en 2024 : une réponse à une crise des rénovations
Depuis le 1er janvier 2024, MaPrimeRénov’ a été réformée pour devenir plus sélective, avec un recentrage sur les rénovations « d’ampleur ». Cette réforme visait à encourager les rénovations globales, c’est-à-dire celles qui permettent une amélioration significative de la performance énergétique des bâtiments, plutôt que les simples travaux dits « mono-gestes » (comme le remplacement d’une chaudière ou l’installation d’une isolation). Cette orientation a pour but d’optimiser l’utilisation des fonds publics en soutenant des projets ayant un impact majeur sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Toutefois, face à la baisse du nombre de projets de rénovation, notamment chez les ménages aux revenus modestes, des ajustements ont été introduits pour la période du 15 mai au 31 décembre 2024. Ces ajustements permettent de financer des travaux plus simples, même en l’absence de Diagnostic de Performance Énergétique (DPE), un document qui évalue la consommation énergétique d’un logement et ses émissions de gaz à effet de serre. En supprimant temporairement l’exigence du DPE, ces mesures facilitent l’accès aux aides pour des travaux plus modestes, redynamisant ainsi l’activité du secteur du bâtiment.
Un risque pour la transition écologique et l’économie du secteur
Les signataires de la lettre ouverte soulignent que ces ajustements ont été nécessaires pour répondre à une crise dans le secteur. Ils précisent que l’effondrement des travaux de rénovation énergétique pénalise non seulement l’activité économique des professionnels du bâtiment, mais également la réussite des objectifs environnementaux fixés par la France.
L’arrêt de ces ajustements au 31 décembre 2024, comme le prévoit actuellement la réglementation, inquiète ces acteurs. Ils alertent sur le fait que de nombreux ménages ne pourront pas bénéficier des économies d’énergie promises, notamment en raison de factures énergétiques qui resteraient élevées. En outre, les objectifs de décarbonation du secteur du bâtiment, essentiels à la lutte contre le réchauffement climatique, seraient également compromis.
Les organisations signataires estiment que la prolongation des mesures en vigueur au-delà de 2024 est cruciale pour garantir la réussite de la transition écologique. Selon elles, cette prolongation n’est en rien incompatible avec les contraintes budgétaires de l’État et est, au contraire, nécessaire pour éviter un retour aux dispositions plus restrictives mises en place au début de l’année 2024.
Un retour aux anciennes règles aurait, selon les signataires, des conséquences « désastreuses » non seulement pour les ménages et l’environnement, mais aussi pour le secteur du bâtiment et les industries associées. En effet, sans ces ajustements, de nombreux projets de rénovation ne seraient plus viables, mettant en péril des milliers d’emplois dans le secteur du bâtiment et des services liés à la rénovation énergétique.
Un enjeu central pour le discours politique à venir
Ce cri d’alarme intervient à quelques jours du discours de politique générale du Premier ministre Michel Barnier, prévu mardi. Ce discours devrait aborder les grandes orientations du gouvernement en matière d’énergie, d’environnement et de logement. Les signataires espèrent que leur appel sera entendu et que le gouvernement s’engagera à prolonger les ajustements de MaPrimeRénov’, voire à envisager des mesures plus pérennes pour soutenir la rénovation énergétique en France.
En conclusion, cette lettre ouverte traduit l’urgence d’agir pour soutenir un secteur essentiel à la transition énergétique et à la lutte contre le changement climatique. Le maintien des ajustements de MaPrimeRénov’ est perçu comme une condition sine qua non pour que la France atteigne ses objectifs de décarbonation dans le bâtiment, tout en préservant l’activité économique d’un secteur en difficulté.